Le temps contraint et les vertus des processus itératifs

Billet écrit en temps contraint

Depuis quelque temps, j’indique en début de certains billets cette mention : « écrit en temps contraint ».

Qu’est-ce que j’entends par « temps contraint » ?

C’est assez simple : le contenu de ce billet est contraint par le temps. Je commence moins d’une heure avant minuit, et je publierai ce billet quelques minutes avant minuit. Sauf si je suis arrivé à quelque chose d’impubliable.

Par contraste, un billet sans la mention « écrit en temps contraint » est un billet qui aura pris plus que quelques quarts d’heure avant minuit, voire qui aura été médité plusieurs semaines, écrit et réécrit, documenté, etc.

Je l’ai déjà écrit, et je le répète : ce qui manque le plus, c’est le temps.

Le temps manque, c’est pour cela qu’assez souvent, je ne me retrouve en face de mon clavier que tard le soir. Les journées défilent à un train d’enfer, semaine comme week-end. Tout est minuté. Tout doit s’enchaîner. Si on n’y prend garde, il ne reste rien pour une activité différente du travail et de la famille. Ou alors des interstices fugitifs. L’un de mes objectifs par ce blog est de construire quelque chose nécessitant un peu plus que des interstices.

Un billet en temps contraint est écrit dans un segment de temps. Un peu plus qu’un interstice. Un segment, avec un début et une fin.

Le début, c’est quand le reste des autres activités, toutes confondues, est terminé. En l’occurrence, pour prendre l’exemple de ce samedi soir, quand le repassage est terminé.

La fin, c’est minuit. C’est une règle que je me suis fixée. Ca ne veut pas dire que j’irai me coucher à minuit cinq. Ca n’est pas pour essayer de sauver un quota d’heures de sommeil. Je ne crois pas que le lien entre sensation de fatigue et heures de sommeil soit linéaire, ni même direct. Minuit, c’est juste le passage au lendemain. Donc un billet publié après minuit est horodaté du lendemain.

Or je tiens à l’objectif d’un billet par jour. Au moins 5 ou 6 fois par semaine. Je ne veux pas laisser trop filer le rythme. A tort ou raison, je pense qu’un billet publié à minuit et demie sera une incitation à baisser le rythme le lendemain. Je veux éviter de rentrer dans cette spirale. C’est peut-être une idiotie narcissique, une coquetterie déplacée, mais c’est comme ça.

Ça ne m’empêche pas de laisser filer certains soirs. Hier soir par exemple… trop fatigué, trop froid, trop fatigué, c’est l’hiver.

Je crois beaucoup aux vertus des méthodes « itératives », ou « incrémentales », en informatique et ailleurs. Je crois beaucoup aux vertus des processus cycliques.

Je crois assez peu au mouvement quand il ne s’inscrit pas dans un cadre itératif, de préférence régulier. Version après version, lot après lot, palier après palier, étage après étage. Il faut que quelque chose ou quelqu’un batte la cadence. Ça permet de pouvoir faire le point périodiquement, et de vérifier alors qu’il y a bien eu mouvement (et progrès !). Ça permet de synchroniser les différentes parties prenantes quand il y en, de fixer des rendez-vous, de se dire : voilà là où nous devrons nous retrouver dans tel état. Ça permet de définir des ambitions : voilà tout ce que nous voulons accomplir pour ce cycle — tout en préparant la suite : ce qui ne sera pas prêt visera le cycle suivant.

J’ai toujours beaucoup admiré la presse et ses cycles, par exemple la grande presse quotidienne, avec sa chronologie serrée, ce qu’ils appelaient je crois le « chemin de fer ». Depuis mon enfance, je trouve une telle organisation fascinante. Je me rappelle avoir lu, fasciné, à divers âges, des articles expliquant comment une telle organisation fonctionne. Ça m’épate, notamment par-rapport à la diversité et la densité des sources, le nombre de journalistes : arriver à amener chacun à « livrer » à l’heure, à faire que les tailles fournies puissent s’emboîter correctement, à préserver l’homogénéité de l’ensemble, tout cela m’a toujours paru prodigieux.

Je me méfie de trop de laisser-aller. Je me méfie de la procrastination — ce mot compliqué pour dire « remettre à demain ce qu’on aurait (peut-être) pu faire le jour même –, même si j’y cède parfois, et j’ai d’excellents amis procrastinateurs pratiquants. Je pense que le travers d’un format tel qu’un blog c’est précisément que, par défaut, il n’y a pas de contrainte de rythme. C’est un confort, c’est une liberté, c’est un bonheur … mais ça peut être une faiblesse.

Je ne sais pas si je tiendrai (hors vacances) le rythme que je me suis proposé en ce début d’année. Mais je ne veux pas lâcher l’affaire sans avoir essayé. Je rappelle que ce blog est un prototype.

Il est 23h59.

Bonne nuit.

Cet article, publié dans Uncategorized, est tagué , , , , , , , , , , , , . Ajoutez ce permalien à vos favoris.

3 commentaires pour Le temps contraint et les vertus des processus itératifs

  1. Georges dit :

    J’aime beaucoup votre concept car je me reconnais dans les contraites que vous décrivez et le manque absolu de temps pour faire autre chose que ce qui doit être fait pour que les organisations professionnelle et familiale fonctionnent sans accroc. J’aime aussi l’idée de lire et m’adresser « seulement » à un esprit: aucune info sur qui vous êtes, voire brouillage d’info, sur le genre notamment ( « je me suis fixéE », … « trop fatigué »…). Votre hommage sur Attali m’a également parlé… car même constat final!
    Vous essayez de publier un billet par jour, j’essaierai de les lire et de participer, en temps contraint…

  2. Georges dit :

    Merci d’avoir pris le temps de répondre à ce commentaire un peu niais, écrit à la va-vite, n’ayant même pas compris la règle de l’accord du participe passé…!

    Merci pour ce blog, vos analyses, vos références littéraires, notamment en anglais, qui moi me font découvrir des choses, le tout dans un style d’écriture que je trouve très bon.

Répondre à Georges Annuler la réponse.